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Numéro 9/06

Transmettre ... par les jeunes

Ateliers de culture musicale et artistique (ACMA)

Pratiquant la pédagogie musicale depuis une vingtaine d’années, j’ai pu constater une baisse progressive du niveau de culture musicale... Interpellée par ce phénomène, j’en déduis qu’il est urgent d’entreprendre une reprise en charge éducative. Petit pas dans ce sens, la mise sur  pied à l’école « Un, Deux, Trois Musiques... » d’ateliers de culture musicale et artistique (ACMA).

     

par Nicole Coppey

Photo Yvan Pitteloud

Le quatuor 4Ygrecs, dans une de ses créations originales

Rien d’extraordinaire dans ce projet, si ce n’est qu’il a été conçu avec la collaboration de jeunes afin de les responsabiliser, les impliquer pratiquement dans cette réflexion et les inciter ainsi à être porteurs de la communication. Ce projet se distingue donc par l’originalité de sa démarche pédagogique et didactique sous la devise : « Les jeunes transmettent aux jeunes. » La tâche a ainsi été confiée à quatre jeunes déjà complices puisque ces musiciens de formation classique (violon, violoncelle, piano) nourris à la pédagogie Orff, forment par ailleurs le quatuor 4Ygrecs tourné vers des créations artistiques pour percussions éclectiques, du berlingot au djembé, en passant par le stylo, la machine à écrire, les bâtons, les chaises ou encore d’autres matériaux de la vie de tous les jours (relevons au passage que toutes les pièces du quatuor sont composées par Domitille, direction musicale du quatuor).
Nouvel objectif pour les quatre jeunes musiciens : mener plusieurs rencontres didactiques et apporter aux 25 participants de ces ateliers (enfants, jeunes et adultes) un condensé sur des thèmes culturels, musicaux et artistiques.
Pour ancrer cette démarche dans l’actualité, les thèmes ont été choisis en fonction des concerts du Festival international de Sion-Valais 06 qui a débuté en août. Dans le prolongement de ces ateliers, des rencontres « avant-concerts », gérées également par le quatuor 4Ygrecs, feront  découvrir aux participants le contexte musical et artistique d’œuvres du  Festival sous forme d’un moment de partage et de convivialité.

 

Premières impressions

Laissons la parole aux 4Ygrecs :

Nadège, 17 ans : « Ce projet m’a tout de suite emballée. Je l’ai vu comme une opportunité : montrer que les jeunes ne se tournent pas tous vers des musiques inaudibles mais qu’ils peuvent aussi prendre du temps à faire des recherches pour présenter un sujet issu du monde classique. »

Mathieu, 18 ans : « A peine notre précédent projet terminé, Nicole nous a rapidement proposé celui-ci. C’était quelque chose de tout à fait nouveau et nous étions certains d’acquérir une expérience peu commune en y participant. »

Domitille, 17 ans, présidente du projet : « L’extraordinaire idée de Nicole m’a beaucoup enthousiasmée: cette manière de promouvoir la culture musicale par des jeunes qui apprennent aux jeunes est vraiment d’une grande profondeur car cela nous permet d’être une fois de plus porteurs d’un concept tout à fait innovant, d’approfondir nos connaissances musicales, de rôder nos capacités à s’adresser au public et de nous souder encore davantage... Cette formule a vraiment tout pour être intéressante puisqu’elle fait intervenir : connaissances, faculté de synthèse, d’adaptation, sens d’écoute et bien d’autres éléments à long terme que nous découvrirons peut-être aussi avec le temps, que ce soit pour nous autant que pour le groupe, et tout ça dans une ambiance officielle mais conviviale. »

Timothée, 14 ans : « J’ai pensé que cela permettrait aux participants de mieux apprécier les concerts car ils connaîtraient ainsi le contexte dans lequel l’oeuvre a été composée, etc.. »

 

Question organisation

M. : « Une fois le thème donné, nous nous partageons les chapitres selon nos affinités. Ensuite, c’est un travail de recherche individuel, puis mis en commun. Cela nous demande une bonne organisation. Impossible de traîner la patte car les autres ne pourraient pas se préparer à temps à cause des éléments manquants. Du coup, il faut que chacun soit au point. Puis nous sélectionnons les images et documents ainsi que les questions du quiz. »

N. : « ...Le quiz est un questionnaire qui est distribué aux participants à la fin de chaque atelier et que nous corrigeons pour l’atelier suivant. S’il est bien rempli, il y a une récompense, un CD le plus souvent... »

 

Affinités

M. : « J’ai beaucoup aimé le premier thème sur Chostakovitch où je devais parler des autres arts russes et de sa relation avec le pouvoir politique. C’était une folle découverte de l’avant-garde russe et du réalisme socialiste ! Livres, biographies, visionnage de vidéos, écoute de CD, recherches : tout ce temps passé à collecter la matière puis à l’organiser pour ensuite la présenter m’a été extrêmement bénéfique ! »

 T. : « Mon thème préféré a été celui de l’opéra. J’avais dû traiter plus spécialement les grandes salles d’opéra. J’ai découvert entre autres beaucoup d’anecdotes comme le financement de la reconstruction du National Theater de Munich (à la suite d’un incendie) par la population grâce à une taxe sur la bière. »

 N. : « J’ai aimé traiter tous les thèmes mais celui du violon plus particulièrement. On en parle et en écoute beaucoup grâce au jury d’enfants et au concours international de violon. Ce projet a été très bénéfique car il nous a appris à cibler les informations les plus  importantes et nous a permis de montrer que certains jeunes s’intéressent à autre chose que la plupart des personnes de notre génération. »

D. : « Mes recherches me poussent à aller toujours plus loin, j’essaie de faire un maximum de liens entre ce que je connais soit en culture musicale, en histoire ou en philosophie, et ce que j’apprends de nouveau. C’est pour cette raison notamment que j’ai particulièrement apprécié l’atelier Chostakvitch, homme aux multiples facettes qui, partagé entre sa volonté de liberté d’écriture et ses positions politiques, a pu écrire des chefs-d’oeuvre dans des styles tout à fait différents... »

M. : « Les participants étaient incroyablement captivés. Préparer la matière à présenter est une chose, mais la rendre intéressante pour des enfants et adultes est une autre ! En voyant leurs visages éclairés du désir de découverte, j’étais soulagé d’avoir pu rendre ma présentation captivante. J’avais par exemple préparé des masques pour illustrer l’utilisation des couleurs dans l’opéra chinois. Nous avons essayé d’être interactifs avec les participants car s’ils ne montrent pas d’attention, notre objectif principal n’est pas rempli, malgré toute la bonne volonté imaginable. »

T. : « J’ai pu constater que lorsqu’on demandait au groupe s’ils connaissaient telle ou telle oeuvre, le résultat était très parlant : personne ne connaissait les oeuvres dont nous ne leur avions jamais parlé, mais lorsque nous avons cité une oeuvre évoquée lors d’une rencontre précédente, toutes les mains se sont levées... Les participants entendent les informations au cours de la rencontre et les retrouvent dans le quiz. Ils vont s’en rappeler et peut-être en parler en famille. Le CD joue aussi un grand rôle, car d’autres personnes vont forcément entendre puis s’intéresser à la musique écoutée. Ils vont ainsi pouvoir découvrir des oeuvres totalement nouvelles pour eux et comprendre que la musique classique offre un choix très large. »

D. : « Pour moi il est inconcevable de parler de musique sans en écouter ! Nous avons donc décidé qu’à chaque rencontre, chacun partirait avec un CD – prêté jusqu’à l’atelier suivant – à écouter à tout moment pour développer son sens de l’écoute, sa culture musicale (oeuvres, interprètes, formes musicales,...) et son attrait à la musique dite classique. Je suis persuadée que cette démarche ne peut être que bénéfique pour un enfant en croissance, car la musique constitue une base motrice pour chacun. »

 

Bilan du projet ?

Ecoutons quelques participants entre 7 et ... 64 ans.

Quentin, 8 ans : « C’était bien expliqué, c’était super que ce soit des jeunes. J’ai appris beaucoup de choses très intéressantes... Le thème de l’opéra m’a donné envie d’aller à l’opéra de Lausanne. Les questionnaires m’ont occupé entre les ateliers et j’ai appris à chercher des informations avec mes parents. Je retournerai volontiers à d’autres ateliers pour apprendre de nouvelles choses. »

Son frère Ludovic, 10 ans : « C’est cool d’avoir des grands qui nous expliquent plein de choses intéressantes sur la musique. J’ai bien compris ce qu’ils voulaient dire, leurs mots étaient simples pour moi. Mon thème préféré a été Mozart. »

Laura, 10 ans : « J’ai bien aimé faire partie de ces ateliers. Les cours étaient très dynamiques et très gais, pleins de punch, animés et bien expliqués avec le quatuor 4Ygrecs. »

Harry, adulte : « L’atelier présenté par quatre adolescents musiciens me paraît être une démarche très fructueuse. D’une part l’attention des enfants fut très soutenue et les réponses aux questions posées très précises et concises. De même pour moi adulte, la présentation était d’un très grand intérêt. L’alternance des présentateurs ainsi que l’utilisation des moyens audio (écoutes ciblées) et visuels (projection sur grand écran) donnaient un relief fort au discours pédagogique.»

Jessie, 12 ans : « Le quatuor a une façon bien à lui d’instruire et c’est justement ça qui fait la différence : au lieu d’avoir un professeur rabougri, il y a quatre jeunes qui, je suppose, prennent autant de plaisir à apprendre que nous en avons en apprenant. Dans leurs cours, on trouve plein de petites anecdotes ou plaisanteries qui rendent le sujet plus intéressant. »
 

Dès lors, ne devrions-nous pas davantage engager des jeunes à prendre des responsabilités face aux générations suivantes... ? La dimension
musicale, culturelle et sociale d’un tel projet me laisse vraiment à la réflexion. Il est évident que les 4Ygrecs étaient supervisés dans cette démarche, mais ils ont pris leurs responsabilités et les ont assumées avec brio. L’expérience acquise dans l’implication d’autres projets leur a permis de gérer les situations avec maturité. Comme l’a dit Mathieu : « Préparer la matière à présenter est une chose, mais la rendre intéressante pour des enfants et des adultes en est une autre », voilà tout l’art de la pédagogie. Ce projet a permis à chacun d’en prendre conscience et de transmettre les connaissances dans la joie, l’authenticité, l’engagement et la passion.

 

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Zusammenfassung

Vermittlung... durch Jugendliche


Nicole Coppey hat nach rund zwanzigjähriger Berufserfahrung als Musikpädagogin ein zunehmend sinkendes Niveau in Bezug auf die Musikkultur festgestellt. Angeregt durch diese Beobachtung hat sie in ihrer Schule «Un, Deux, Trois Musiques...» in Sion die Workshops für musikalische und künstlerische Kultur (ACMA) auf die Beine gestellt.
Deren Grundgedanke ist es, vier jungen Musikern (14- bis 18-jährig) die Leitung von Unterrichtseinheiten zu übertragen. Diese vermitteln den 25 Workshopteilnehmern (Kindern, Jugendlichen und Erwachsenen) einen Überblick zu kulturellen, musikalischen und künstlerischen Themen. Ein Quiz, CD-Ausleihe, interaktives Hören etc. bereichern diese Workshops. Um dieses Vorgehen in der Aktualität zu verankern, wurden Themen im Zusammenhang mit dem Internationalen Festival Sion-Wallis 06, das im August begonnen hat, ausgewählt: zum Beispiel Schostakowitsch, die Geige oder die Oper. Selbstverständlich wurden die jungen Unterrichtenden in ihrer Arbeit begleitet, aber sie haben ihre Verantwortung glänzend wahrgenommen. Die bei anderen Projekten erworbene Erfahrung erlaubte es ihnen, die Situation mit grosser Reife zu bewältigen. Müssten wir also nicht häufiger die Jungen dazu bringen, Verantwortung gegenüber der kommenden Generation zu übernehmen ?


Ubersetzung: Philipp Zimmermann