Numéro 5 / 2006 : Mozart aujourd'hui
 
 

Propos recueillis et traduits par Nicole Coppey

Mozart, un message à notre humanité. Entretien avec Shlomo Mintz

Shlomo Mintz pense que dans le cas de Mozart, même s’il est brillant, on arrive parfois à un stade où on en a trop. Même si elles font du bien à l’esprit, les grandes choses doivent toujours être balancées avec d’autres choses. Les médias et le marketing s’occupent plutôt de l’emballage autour de Mozart que de Mozart lui-même. Il serait préférable de célébrer le personnage, le compositeur, avec de très bons choix. Selon lui, pour interpréter Mozart, il faut passer par deux étapes très importantes : il faut évidemment savoir jouer ses œuvres du point de vue technique, mais il faut naturellement aussi atteindre la simplicité. On y parvient quand on est très jeune ou très vieux, pas nécessairement dans la même chronologie. La chose la plus difficile avec Mozart, c’est d’arriver à ce genre de simplicité en jouant des choses très complexes. En dire plus ne serait pas utile. La chose la plus importante, c’est d’avoir l’esprit assez aiguisé pour pouvoir comprendre la conception. Le reste ressort des techniques spécifiques, de l’expérience et aussi de l’expérience de la vie.
RMS page 12


Jean-Luc Darbellay

Mozart !

Mozart pour moi, tout compte fait, est un " collègue " très important. J’ai eu la chance de faire sa connaissance comme clarinettiste et comme " corniste de basset " d’une manière très intimiste. A commencer par son œuvre ultime, son Requiem écrit pour une formation d’orchestre hors de toutes les normes, avec, comme bois, uniquement les deux cors de basset et les deux bassons. Sarastro, dans  O Isis und Osiris est lui aussi accompagné par deux cors de basset, deux bassons, trois trombones et les cordes graves. Le concerto pour clarinette de Mozart a été écrit, on le sait, à l’origine pour un cor de basset en sol. Ma première partition, Glanum, est écrite pour trois cors de basset. Je l’ai composée afin de " garnir " un programme autour des Divertimeni pour la même formation de Mozart. Celle-ci m’a mené tout droit à mon Requiem à moi qui vient d’être créé par les chœurs et l’orchestre de la Radio de Leipzig sous la direction de Fabio Luisi. Au cœur de la partition, le Recordare. Il est écrit pour un… cor de basset obligé en alternance avec une flûte basse, une combinaison très rare, mais d’une ambiguïté des timbres étonnante.

 RMS page 5


Vincent Favre

Mozart et le jazz : un exemple d’improvisation structurée

Le pianiste romand Vincent Favre a été invité le 27 janvier, jour du 250e anniversaire de Mozart, dans l’émission JazzZ sur Radio Suisse Romande Espace 2 afin de tenter un " rapprochement " entre la musique de Mozart et la sienne (disons la nôtre – celle d’aujourd’hui). Et il a joué à cette occasion des pièces au piano en se servant – se jouant – de compositions de Mozart. Généralement, les compositeurs désireux de varier un thème choisissent de préférence des sujets assez simples, par exemple des morceaux de type " aria ", se réservant à eux-mêmes tout le travail de développement. Donc pas de fugue, pas de mouvement de forme sonate. A priori. Vincent Favre a choisi de transcrire l’introït du Requiem (qui contient une fugue !) et l’introduction du Quatuor 19  les dissonnances , K. 465 (qui s’inscrit dans une architecture de forme sonate !). On a surnommé ce quatuor les dissonances à cause de son introduction. Mais la rupture que Vincent Favre impose dès la fin de l’énoncé de Mozart par un accord bartókien, fortissimo subito en point d’orgue, nous fait mesurer toute la distance entre la notion de dissonance que pouvait avoir un musicien du XVIIIe siècle et la nôtre. Ensuite il développe :
1.  l’harmonie chromatique des mesures 1-3 et 5-7,
2. les mouvements ascendants en dixièmes parallèles des mesures 4 et 8,
3. la présence suggérée de l’accord augmenté à la mesure 12,
4. l’intervalle de neuvième mineure à la mesure 9,
5. la pédale de dominante qui clôt l’épisode, mesures 16-22.
Le langage varie de l’atonalité pure à une tonalité plus ou moins élargie.
 

RMS page 7


Comptes rendus

• Une journée consacrée au quatuor à cordes